Qu’est-ce que les violences ?
Les violences conjugales, exercées dans la sphère privée que représente le foyer conjugal, sont souvent considérées comme relevant de l’intime. Elles sont de fait souvent incomprises, rendant difficile la prise de conscience de la part des victimes, qui font face seules à des violences souvent minimisées et banalisées.
Les différentes formes de violences conjugales
Les violences conjugales sont un phénomène social, et découlent d’une société inégalitaire, dans laquelle 1 femme sur 10 en France en est victime. Ce constat met en lumière un véritable problème de santé publique grave et d’ampleur, ainsi que notre inévitable proximité avec le sujet, et, de fait, une nécessité de se l’approprier et de le comprendre. Ces violences peuvent prendre différentes formes et s’installer dans la durée, rendant parfois difficile leur identification. Il est donc important de pouvoir les nommer et les identifier, afin d’être en mesure de dénoncer et d’agir.
Définition des violences conjugales
- Tout acte de violence fondé sur l’appartenance sexuelle qui entraîne ou est susceptible d’entraîner pour les femmes qui en sont la cible des dommages ou souffrances de nature physique, sexuelle ou psychologique, y compris la menace de se livrer à de tels actes, la contrainte, la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée.
Les violences conjugales sont, dans une relation privée ou privilégiée, des atteintes volontaires à l’intégrité de l’autre, une emprise, un conditionnement dont il est difficile de se dégager. Elles résultent d’un abus de pouvoir dans une relation de couple, l’un des partenaires utilisant sa force ou la contrainte pour perpétuer et/ou promouvoir des relations hiérarchisées et de domination, par le biais de comportements agressifs et violents.
Différencier le conflit conjugal de la violence conjugale
Il y a conflit conjugal lorsque deux personnes sont à égalité lors d’une dispute, et si elles sont en désaccord pour une raison, une situation, un objet extérieur aux deux conjoints. Un différend, un malentendu, une incompréhension se dresse entre les deux personnes, mais il est toujours possible de négocier, de faire entendre son avis et de demander à chacun de se remettre en question.
Cependant, lorsque l’intégrité et la voix de l’un des deux conjoints n’est pas entendue ou respectée, qu’au cours d’un conflit l’un agresse l’autre verbalement ou physiquement, cela constitue une alerte grave et un premier pas vers la violence conjugale.
La violence conjugale est déclenchée par l’auteur sous n’importe quel prétexte, et vise à vérifier et réaffirmer sa domination sur sa victime. Cette dernière n’a pas le droit de s’exprimer, et est systématiquement rabaissée, humiliée ou violentée lorsqu’elle le fait. La violence s’exprime le plus souvent de manières simultanées ou passe d’une forme à l’autre. Les faits ne sont pas isolés ou accidentels, ils sont multiples et réguliers. Les comportements violents se multiplient, alternant avec des moments d’accalmie. Se met alors en place un processus de déstabilisation de la victime, qui sera souvent confrontée à l’incompréhension de son entourage et des professionnel.le.s, et un terrain propice à l’installation du cycle des violences.
Les formes de violences qui doivent alerter
L’auteur utilise sa voix comme une arme, soit par les propos tenus, soit par le ton utilisé. Si certains hommes violents vont élever le ton pour intimider leur compagne, d’autres, au contraire, vont prendre une voix plus suave et posée, ou garder leur timbre habituel pour proférer des injures, menaces ou sarcasmes, la rendant difficile à identifier. De fait, la violence verbale va souvent de pair avec la violence psychologique, puisque le conjoint violent utilise la violence verbale pour menacer, intimider, dévaloriser ou humilier sa victime.
- Relèvent de la violence verbale : les reproches, les critiques, les humiliations, les menaces envers la femme et/ou les enfants, les insultes, l’emploi d’un ton brusque dans le but d’effrayer et de mettre mal à l’aise sa victime…
C’est un ensemble de comportements, de paroles, d’actes et de gestes visant à porter atteinte à l’intégrité psychique ou mentale de l’autre. L’auteur atteint sa victime dans son image, son identité, sa confiance en elle et son estime d’elle-même, jusqu’à ce qu’elle perde progressivement confiance en elle et en ses capacités. Cette forme de violence s’incarne par des attitudes ou des propos méprisants, rabaissants et humiliants. La victime s’isole de plus en plus des autres par peur du jugement, s’enferme dans la honte.
- Relèvent de la violence psychologique : les critiques, le chantage, l’intimidation, les menaces (de séparation ou de suicide, par exemple), les privations (de sortie, d’affection, la limitation d’accès au travail), les injures, l’isolement de la famille et des ami.e.s…
Elle désigne tout acte entraînant des dommages corporels ou risquant d’en entraîner, que l’auteur use de sa propre force physique ou bien d’objets externes, dans le but de soumettre sa victime à son pouvoir. Contrairement à une idée répandue, la violence physique n’est pas systématique à toute situation de violence conjugale.
- Relèvent de la violence physique : frapper, pincer, gifler, pousser, brûler, poignarder/fusiller, empêcher des besoins physiques (manger, boire, aller aux toilettes), séquestration, frapper dans / casser un objet, ne pas porter assistance à la victime en danger, féminicide…
On entend par violence sexuelle tout acte sexuel, tentative d’obtention d’un acte sexuel, tout commentaire ou avance de nature sexuelle, visant à imposer son propre désir à autrui, sans son consentement ou sa compréhension. Les viols, les agressions sexuelles, les rapports acceptés sous la contrainte ou pour calmer le conjoint violent sont réguliers. Les victimes ont beaucoup de mal à en parler, ces pratiques restant pour elles associées à ce qu’elles pensent être le « devoir conjugal », et reste donc la forme de violence la plus cachée.
Relèvent de la violence sexuelle : le fait de forcer sa partenaire à avoir des rapports sexuels non consentis (avec lui ou avec d’autres partenaires), se prostituer, envoyer des photos/vidéos d’elle à caractère sexuel, visionner du contenu pornographique…
Mais aussi : le contrôle sur la prise de contraceptifs, la limitation des naissances, les grossesses ou avortements non désirés, transmission d’infections sexuellement transmissibles…
Elle désigne tout acte entraînant une dépendance financière/matérielle ou une précarisation de la victime, encourageant son isolement, dans le but de réduire son autonomie et limiter ses possibilités d’échapper à la relation. Elle est exercée différemment selon les milieux.
- Relèvent de la violence économique et matérielle : la privation ou le contrôle des ressources financières et matérielles, l’engagement de crédit à l’insu de la victime, le contrôle des activités professionnelles (interdiction de travailler ou empêchement à travailler), les privations matérielles, le contrôle précis des dépenses…
Elle se manifeste principalement par la confiscation de documents (carte nationale d’identité, permis de conduire, livret de famille, carte vitale…). Cette forme de violence concerne notamment les femmes étrangères conjointes de ressortissants français et les femmes étrangères bénéficiant d’un regroupement familial. On parle de double violence pour désigner les violences conjugales et les pressions ou le chantage exercés par le conjoint autour de l’obtention ou le renouvellement du titre de séjour. La rupture de la vie commune peut avoir une incidence sur le droit de séjourner sur le sol français.
Cette liste n’est pas exhaustive, et d’autres formes de violence peuvent également être exercées. Certains conjoints violents utilisent notamment les enfants ou les animaux pour faire pression sur leur compagne, menaçant de torturer/tuer un animal, par exemple. Ils peuvent également utiliser des biens matériels comme objet de chantage.
La violence conjugale tue
Les violences conjugales peuvent aller jusqu’à l’homicide. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 70% des femmes victimes d’homicide ont été tuées par leur compagnon. La dispute et le refus de la séparation demeurent les principaux mobiles de passage à l’acte.
Ces faits représentent 20% de l’ensemble des homicides et violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner enregistrés en France en 2019.
41% des femmes victimes d’homicide avaient déjà subi des violences antérieures et 43% d’entre elles avaient déposé une plainte antérieure.
Cette violence et mortalité est en hausse : en 2019, 146 femmes ont été tuées par leur conjoint, un chiffre en hausse de 25% par rapport à 2018.
Suis-je victime de violence ?
Le violentomètre
Le violentomètre est un outil simple et utile pour « mesurer » si sa relation amoureuse est basée sur le consentement et ne comporte pas de violences.
À la demande du Conseil Régional d’Île-de-France, le Centre Hubertine Auclert a adapté cet outil de sensibilisation conçu fin 2018 par les Observatoires des violences faites aux femmes de Seine-Saint-Denis et de Paris, l’association En Avant Toute(s) et la Mairie de Paris.
Faire le test
L’association Filactions a créé un auto test pour vous permet de savoir si vous êtes victime de violence :
Au cours des 12 derniers mois, est-ce que votre conjoint.e ou ami.e :
- Vous a empêché de rencontrer ou de parler avec des ami.e.s ou des membres de votre famille ?
- Vous a empêché de parler à d’autres hommes ?
- A critiqué, dévalorisé ce que vous faisiez ?
- Vous a imposé des façons de vous habiller, de vous coiffer ou de vous comporter en public ?
- N’a pas tenu compte ou a méprisé vos opinions, a prétendu vous expliquer ce que vous deviez penser dans l’intimité ? Devant d’autres personnes ?
- A exigé de savoir avec qui et où vous étiez ?
- A cessé de vous parler, refusé totalement de discuter ?
- Vous a empêché d’avoir accès à l’argent du ménage ?
Si avez répondu « oui » à 3 questions ou plus, ou si ces évènements se sont produits plusieurs fois, alors vous êtes peut-être victime d’une ou de plusieurs formes de violences conjugales : physiques, morales, psychologiques et / ou économiques.