Le cycle des violences

Les violences s’installent dans la durée, car elles sont le fruit d’un cycle infernal très difficile à briser. Parfois, une femme peut se rendre compte qu’elle en est victime après avoir passé plusieurs palliers de violences.

Les violences s’installent à travers plusieurs étapes  

Les violences sont d’autant plus difficiles à détecter qu’elles s’installent progressivement et passent par plusieurs paliers :

L’auteur initie des tensions, à travers divers signaux (silence lourd, regard menaçant, irritabilité, reproches, intimidations, excès colériques, augmentation des conflits, impatience de plus en plus présente…). Le moins prétexte peut être utilisé pour justifier sa colère : la salière est mal placée, les enfants le fatiguent, elle a trois minutes de retard, un surcroit de travail, d’alcool, de stress, le chômage, la maladie… La victime est anxieuse, elle tente par tous les moyens d’apaiser le climat de tension, de faire diminuer la pression. Elle a peur, doute d’elle-même et de ses capacités, et marche sur des œufs, se pliant aux attentes de son partenaire. C’est la mise en place du système d’emprise.

L’épisode violent éclate, et l’auteur passe à l’acte en usant de comportement violents (verbaux, physiques, psychologiques, sexuels, économiques…), avec ou sans aide d’objets. Il dit « qu’il ne peut pas s’en empêcher ».

De son côté, la victime a peur, est triste, a honte, et se sent humiliée. Elle ressent un profond sentiment d’injustice, de tristesse, de colère et de désespoir, et se sent démunie et impuissante.

L’auteur des violences rejette la faute sur sa victime dans le but d’annuler sa responsabilité. Il tente de se déresponsabiliser de ses actes, se justifiant de diverses manières (minimisation, rejet de la faute sur des éléments extérieurs (« si la salière n’avait pas été mal placée / les enfants ne m’avaient pas fatigué / tu n’avais pas 3 minutes de retard, rien de tout cela ne serait arrivé »)).

Pensant que c’est à elle de changer, la victime accepte les justifications de son agresseur et prend la responsabilité de l’acte violent. Elle se remet en question, et pense que si elle change de comportement, et/ou aide l’auteur à changer, la violence cessera.

Après la crise, l’auteur cherche à se faire pardonner. Il exprime ses regrets tout en minimisant les faits et en justifiant son comportement. Il cherche la réconciliation, regrette, supplie, ou tente de culpabiliser sa victime en menaçant de se faire du mal. Il redevient très amoureux, fait des promesses, achète des cadeaux, partage les tâches ménagères, l’éducation des enfants. Il promet qu’il ne recommencera plus, envisage de demander de l’aide, d’engager une thérapie de couple.

De son côté, la victime retrouve espoir, et, constatant les efforts de son agresseur, lui (re)donne une chance. Elle a l’impression de retrouver l’être aimé.

C’est durant cette période que la victime est la plus susceptible de retirer sa plainte ou de revenir au domicile conjugal. Plus l’emprise sur la victime est forte, plus les périodes de lune de miel se font rares, jusqu’à disparaitre complètement.

C’est également pendant cette période que, souvent par manque de connaissance sur l’aspect cyclique des violences, les ami.e.s, la famille, les voisin.e.s ou les collègues, ne la comprennent plus. Ils et elles se sentent impuissant.e.s, sont déçu.e.s de l’attitude de la victime, et se promettent de ne plus intervenir. Il en est de même pour les professionnel.le.s n’ayant pas reçu de formation spécifique sur le sujet.

Ce qui retient une femme de sortir de ce cycle de violences

La honte

L’agresseur inverse les rôles et culpabilise la victime. Elle a honte car elle pense avoir déclenché l’épisode de violences.

La méconnaissance et la crainte de représailles

Ne pas connaitre ses droits, les mécanismes judiciaires. La peur de représailles encore plus violentes.

 L’espoir

De modifier le comportement du conjoint, celui-ci étant tantôt violent, tantôt aimable et affectueux.

Le désir de préserver l’unité familiale

De ne pas priver les enfants de leur père, tant que celui-ci ne les agresse pas directement.
La victime craint de perturber la scolarité des enfants ou d’en perdre la garde.

La peur de 

tomber dans la précarité

Ou de ne pas trouver un logement, un emploi, surtout à partir d’un âge où recommencer « à zéro » peut être objectivement difficile.

L’isolement

Ou la pression de l’entourage et de la famille.

La perte

Exclusion, expulsion… En particulier pour certaines femmes issues de l’immigration, dont le droit de séjour dépend du mari.

La crainte du déshonneur

Exclusion, expulsion… En particulier pour certaines femmes issues de l’immigration, dont le droit de séjour dépend du mari.

Le sentiment d’injustice

Il est difficile pour une femme de quitter son logement ainsi que tous les repères
de sa vie quotidienne.C’est à l’agresseur de partir.